La nuit est douce, caressante, de celles qui laissent sur la peau des frissons incertains...
Au milieu des riches tentures, des buissons de roses, des bruissements d'étoffe, des rires, des soupirs et des mille lumières.
La fête étincelle.
Derrière les lianes fleuries, Jean Gaussin contemple les danseurs. Blond, le visage hâlé par son soleil méridional... Perdu parmi la foule bariolée des Peintres et des sculpteur parisiens... La musique, les parfums, les bras nus l'effraient d'abord puis l'enivrent. Brusquement, elle est à ses côtés. Sapho ! Belle, mystérieuse, sensuelle. Quand elle l'entraîne, il la suit. L'amour fera le reste... L'amour, un poison si précieux et si doux que, distillé avec adresse, il pénètre et corrompt jusqu'au tréfonds de l'âme...
Alphonse Daudet n'a pas seulement chanté la Provence perdue de son enfance. Dans Sapho, c'est un Paris bien incarné qu'il met en scène, celui de la bohème artistique de son temps, se consumant dans l'ivresse de la fête et des conquêtes d'un soir.
Jean, jeune provençal fraîchement monté à Paris, s'éprend d'une très belle femme - modèle - connue sous le nom de Sapho. Sera-ce une de ces liaisons sans lendemain ? Sapho n'est plus jeune et pressent qu'elle vit son dernier amour, mais, pour Jean, c'est le premier. Décalage du temps, désaccord des âmes...
Trente ans avant le Chéri de Colette, Daudet a l'intuition magistrale de « ce genre d'amours auxquels le sentiment maternel ajoute une dimension délicieuse et dangereuse » (Michel Tournier).